Les vendredi 6 et samedi 7 novembre, le théâtre Jean Vilar à Vitry-sur-Seine programmait Le Moulin du Diable, la dernière création de Fouad Boussouf avec la Compagnie Massala. On vous en parlait ici.

La pièce pour 5 danseurs explore notre complexe rapport au temps en seulement 60 minutes.
Le choix du titre par le chorégraphe n’est pas anodin : l’expression « moulin du diable » rapportée par Pierre Bourdieu en 1950, désignait l’horloge pour les paysans kabyles. Elle garde tout son sens aujourd’hui.
Le mot « moulin » renvoie à la mécanique. C’est le rapport au temps qui nous broie. La référence sardonique, quant à elle, nous prévient : que suivons-nous donc dans cette course effrénée ?
Ce samedi, l’heure de spectacle a filé. Les danseurs hybrides ont présenté une danse contemporaine, pimentée de mouvements de hip hop. Mais contrairement à un clip vidéo où l’important est souvent de faire comme tout le monde, ici, ce sont les moments de décrochage qui sont les plus intéressants.

Les 5 interprètes nous invitent à questionner nos façons de vivre le temps et les contraintes que nous imposons au corps. Les repères naturels, tels que l’alternance jour-nuit ou le cycle des saisons sont ignorés, au point de ne plus savoir quand nous activer ou quand nous reposer. Le temps est devenu une commodité, un fluide avec lequel on s’arrange.
Et la troupe va plus loin en nous proposant des pistes de réflexions sur l’emploi que nous faisons de notre temps si précieux.
Nous courons, fuyons, cherchons, exultons, suivons la mode, les autres, les ordres, la morale, les recommandations religieuses… Nous nous essoufflons. Nous remplissons nos journées. Nous optimisons. Nous profitons. Nous « maximisons ». Tout vaut mieux que l’ennui, le vide ou encore l’ostracisme réservés à ceux qui ne suivent pas.

Pour accompagner les déplacements, des arrangements musicaux subtils ont été créés. Tantôt, ils nous bercent : on entend le métronome idéal, les battements de coeur maternel de notre vie intra-utérine. Tantôt ils nous heurtent rappelant l’assaut permanent fait à nos oreilles citadines par le vrombissement des moteurs. C’est un maelstrom de sonorités fines qui évoque tant les boîtes-à-musique que les clochers d’antan.
Quant à la scénographie épurée de ce spectacle, elle est faussement simple. Les gongs suspendus au dessus des têtes forment tantôt des halos de lumière, tantôt des balanciers d’horloge. Les symboles foisonnent.
Enfin, les jeux de lumière changent lors du grand final. L’atmosphère semble à la fois plus noire et plus dense. On a l’impression d’être en pleine nuit, en pleine rue. Quelque part entre West Side Story et Scarface, on comprend que c’est la fin du voyage.
Dans une société où on réclame toujours plus, on ne s’étonne pas que le public crie « encore. »

Le Moulin du Diable
Chorégraphie Fouad Boussouf
Assistante chorégraphe Dalila Cortes
Interprétation Soukaina Alami, Guillaume Chan Ton, Salomon Mpondo-Dicka, Jorane Rest, Teddy Verardo
Scénographie Juliette Deschamps
Création lumière Rodolphe Villevieille et Juliette Deschamps
Création musique & arrangements Marion Castor
Costumes Nadia Rémond
Le Moulin du Diable en tournée
Le 19 Novembre à 19h00, Le Moulin du Diable (extrait), Festival Kalypso, MAC, Créteil
Le 21 Novembre à 20H00, Le Moulin du Diable (extrait), [re]connaissance, L’Hexagone, Meylan
Le 26 Novembre à 20H30, Le Moulin du Diable, Salle Jacques Brel, Fontenay-sous-Bois
Le 11 Décembre à 20H30, Le Moulin du Diable, Théâtre de Chevilly Larue
Tournée 2016
Le 22 Janvier à 21H00, Le Moulin du Diable, Le Prisme, Elancourt
En savoir plus sur la Cie Massala
Image de Une, Le Moulin du Diable, Cie Massala crédit photo Karo Cottier.