Grand succès pour la Compañia Nacional de Danza de España à Vaison Danses

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Le Festival de Vaison Danses commence très fort cette année, avec la Compañia Nacional de Danza de España. Dirigée depuis septembre 2011 par José Carlos Martinez (Etoile du Ballet de l’Opéra de Paris), la formation espagnole est devenue une référence de versatilité, de force et de jeunesse. Se basant sur un impressionnant répertoire classique et assumant un goût prononcé pour des pièces avant-gardistes, la compagnie s’est construite ces dernières années, une image moderne grâce à de nombreuses collaborations avec les grands chorégraphes contemporains.

Compania Nacional de Danza de Espana au Théâtre Antique de Vaison-la-Romaine photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana au Théâtre Antique de Vaison-la-Romaine
photo Gia To

Pour cette représentation à Vaison Danses en cette belle soirée d’été du 18 Juillet 2017 au Théâtre Antique, nous avons pu voir trois pièces, formant une durée totale de 1h20, avec 20 minutes d’entracte: The Vertiginous thrill of exactitude de William Forsythe, Hasta siempre…? de Sharon Friedman, et enfin, Minus 16 d’Ohad Naharin.

Compania Nacional de Danza de Espana - The Vertiginous thrill of exactitude photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana – The Vertiginous thrill of exactitude
photo Gia To

La première partie de Forsythe fait une démonstration magistrale de la virtuosité des danseurs, avec tout l’arsenal technique de la danse classique sur la Symphonie n° 9 de Schubert. La pièce est exécutée brillamment, servie par une synchronisation à la nanoseconde. La chorégraphie marque aussi par l’audace de ses compositions: solis, duos, trios, nous sommes en extase devant cette exactitude, maîtrisée, propre, sans faute. Saluons aussi la note moderne des costumes, arborant une palette de couleurs très tendance : du bordeaux seyant pour les hommes, et un vert pomme très frais pour les dames.

Compania Nacional de Danza de Espana - Hasta siempre...? photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana – Hasta siempre…?
photo Gia To

La deuxième partie est une version exclusive du ballet de Sharon Friedman Hasta Donde…? créée pour la Compañia Nacional de Danza de España. L’oeuvre est un duo basé sur la technique du contact: « La danse n’est pas qu’une affaire esthétique, mais une pulsion vitale. » Sa recherche chorégraphique se concentre sur un espace où les danseurs exploitent leurs limites physiques, où la disparition du geste du premier donne naissance au geste du suivant. Sur ce principe, nous avons pu découvrir une pièce envoûtante, avec deux danseurs extraordinaires, Aleix Mañé et Daan Vervoort.

Compania Nacional de Danza de Espana - Hasta siempre...? - photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana – Hasta siempre…? – photo Gia To

La chorégraphie très ancrée au sol, mélange douceur et puissance. En contraste avec la première pièce de Forsythe, elle ne recherche effectivement pas la beauté. Nous entrons dans un autre univers, avec un éclairage intimiste. Nous devenons témoins d’une danse en confrontation, et en solidarité, avec des élans spectaculaires de jetés, mais aussi d’abandon et de replis. La version minimaliste présentée à Vaison nous a pris aux tripes, même sans la scénographie d’origine, qui démultiplie les ombres des danseurs. Ce dépouillement adapté pour cette représentation en plein air est d’autant plus frappant, car la force de l’interprétation ne repose que sur la performance des danseurs, sans aucun artifice.

Compania Nacional de Danza de Espana - Minus 16 photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana – Minus 16
photo Gia To

Enfin, la troisième pièce, Minus 16, est construite à partir d’extraits de précédentes oeuvres de Ohad Naharin, dont Mabul, Anaphaza et Zachacha. Au son de musiques traditionnelles israéliennes et cubaines, les danseurs parés de costumes noirs se soumettent aux contraintes de l’improvisation et de la participation du public. Dans cette pièce, Naharin utilise la technique Gaga pour capturer les mouvements instinctifs des danseurs, afin de refléter chaque individualité.

Compania Nacional de Danza de Espana - Minus 16 photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana – Minus 16
photo Gia To

Cette troisième partie, le plat principal de la soirée, débute après l’entracte, avec la performance d’un seul danseur sur scène, Alvaro Madrigal. Petit à petit, le soliste se laisse aller à une improvisation, tout en jouant avec le public. Les musiques passent du mambo au chacha, sur des sons enjoués. Exercice difficile, mais réussi haut la main : seul sur scène, Madrigal réussit à captiver l’attention du public qui avait rempli le Théâtre Antique ce soir là. A la fin de son jeu, il finit par être rejoint par les autres danseurs de la troupe, habillés du même costume noir et chemise blanche, dans le même délire gestuel.

Compania Nacional de Danza de Espana - Minus 16 photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana – Minus 16
photo Gia To

S’ensuit la fameuse séquence avec les danseurs rangés en demi cercle de Minus 16, rendue célèbre par nombre de compagnies auparavant, dont la troupe originale Batsheva, et celle d’Alvin Ailey. Les costumes trop larges et les musiques punchy glissent sur les références aux films noirs, à la limite de Pulp Fiction, ainsi qu’à l’héritage culturel du chorégraphe israélien Ohad Naharin. Rythmé par des chants religieux, au tempo qui s’accélère, le sujet de l’effet de groupe est brillamment abordé. Le résultat est fort, et soulève la question de l’individualité. Plus loin, c’est aussi le thème de l’exclusion qui est visé.

Compania Nacional de Danza de Espana - Minus 16 photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana – Minus 16
photo Gia To

Enfin, pour compléter la touche finale du tableau, la troupe a fait la surprise de descendre de leur piédestal. En prenant tout le monde de court, les danseurs se sont faufilés dans les gradins, avec pour but d’inviter les spectateurs à monter et à danser sur scène. Malgré quelques réticences au début, les heureux élus ont pu partager les feux de la rampe avec les danseurs. En cassant la barrière de la scène, la compagnie a bouclé le spectacle dans la joie et la bonne humeur, sous les acclamations ardentes du public conquis.

Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses
photo Gia To

Cerise sur le gâteau, après le spectacle, le directeur artistique José Carlos Martinez (Etoile du Ballet de l’Opéra de Paris) s’est prêté au jeu de l’interview. Menée avec brio par Antoine Abou (Université pour Tous), le public a pu mieux comprendre les intentions de la compagnie, et des chorégraphes. Bravo à la Compañia Nacional de Danza de España pour ce bel esprit!

Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses
photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses
photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses photo Gia To
Compania Nacional de Danza de Espana à Vaison Danses
photo Gia To

The Vertiginous thrill of exactitude

Chorégraphie : William Forsythe. Musique: Franz Schubert, Symphonie n°9. Scénographie, lumières: William Forsythe. Costumes: Stephen Galloway. Transmission: Adrea Tallis. Répétitrice: Isabelle Bourgeais. Danseurs: Yae Gee Park, Helena Balla, Kayoko Everhart, Alessandro Riga, Anthony Pina.

Hasta siempre…?

Chorégraphie : Sharon Fridman. Musique originale: Luis Miguel Cobo. Concepteur lumières: Olga Garcia. Costumes; Mizo, by Inbal ben Zaken. Danseurs: Aleix Mané, Daan Vervoort.

Minus 16

Chorégraphie : Ohad Naharin. Assistant du chorégraphe: Erez Zohar. Lumières: Bambi (adapté par Ohad Naharin). Coproduction: Institut del Teatre, Gran Teatre del Liceu, Grec’09 Festival de Barcelona.

Danseurs : Alvaro Madrigal (improvisation), Kayoko Everhart/Daan Vervoort (pas de deux), Kayoko Everhart, Elisabet Biosca, Natalia Munoz, Rebecca Connor, Mar Aguilo, Aida Badia, Shani Peretz, Clara Maroto, Mana Munoz, Daan Vervoort, Antonio de Rosa, Toby William Mallit, Alvaro Madrigal, Aleix Mane, Erez Ilan, Mattia Russo, Niccolo Balossini.

Distribution : Directeur artistique: José Carlos Martinez. Directeur artistique adjoint: Pino Alosa. Coordinateur artistique: Jesus Florencio. Directeur de production: Luis Martin Oya. Adjoint directeur technique: Luis Rivero.

 Où et quand ?

Festival de Vaison la romaine 18 juillet 2017 au Théâtre antique, pour voir toute la programmation c’est ici !

Image de Une, Compania Nacional de Danza de Espana, The Vertiginous thrill of exactitude, photo Gia To photography.com

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