Daniel Linehan – Un Américain à Paris

Daniel Linehan est un jeune chorégraphe très attendu. Attendu tout d’abord parce qu’il est américain et que depuis la grande épopée de la modern dance, emmenée par des figures comme Merce Cunningham ou Trisha Brown entrées depuis dans le panthéon de la danse contemporaine, peu d’artistes d’outre-atlantique ont su franchir nos frontières durablement, assumant un style personnel plutôt que des hommages à leurs ainés. Attendu aussi parce qu’il a suivi le cycle de recherche de P.A.R.T.S, l’école d’Anne Teresa de Keersmaeker qui a déjà formé nombre de grands artistes, comme la Mudra de Béjart l’avait fait en son temps. Mais attendu surtout parce qu’on a déjà pu le découvrir dans un solo incroyable en 2008, Not About Everything aux Rencontres Chorégraphiques de Seine-Saint-Denis, puis plus récemment l’an passé au Théâtre de la Bastille, défricheur de talent si il en est, avec Gaze is a Gap is a Ghost.

Ici point de création, mais trois pièces courtes qui retracent le parcours, déjà impressionnant, du chorégraphe.

Daniel Linehan ©Jason Somma

Chorégraphie Sonifiée

La soirée commence ainsi avec Digested Noise, un solo créé en 2004 dans lequel la danse de Linehan se cherche encore un peu mais laisse poindre une obsession pour l’extension du corps, l’extension de l’identité dévoilée par la danse. Ici le mouvement ne se contente pas des limites de la chair mais s’étend dans l’air par le son et surtout la voix. Le corps évolue sur scène au rythme d’une étrange musique qui semble émaner de la danse et Daniel Linehan, plein d’humour, nous invite dans sa recherche d’extension.

The-Sun-Came ©Opéra de Lille

Une Danse Imprévisible

Puis vient The Sun Came, qui semble tout d’abord construit comme une mosaïque dans laquelle chaque interprète se révèle, se lie à l’autre, tisse des liens dont l’origine ne sera dévoilée qu’ultérieurement dans une structure qui fait penser au film choral. La danse joue des écarts, des oppositions, des variations brusques avec une énergie qui s’intensifie et laisse poindre dans les transitions des instants de fragilité. Puis la structure se confirme, les rapprochements se font plus clairs, plus fréquents jusqu’à l’achèvement de la pièce à l’unisson.

Being Together Without Any Voice ©Bart Grietens

Mécanique d’une Rencontre

Enfin, Being Together without any Voice clôture la soirée. La danse y est ici représentée comme une mécanique loufoque dont les engrenages auraient été montés au hasard. Les danseurs à la recherche de leur indépendance sont pourtant moteurs les uns des autres. Leurs évolutions conjuguées les transforment, les nourrit pour faire évoluer la danse au même titre que les identités se nourrissent par leur porosité.

Fondamentaux par Daniel Linehan

Une programmation qui permet ainsi de revenir aux sources d’un chorégraphe pour qui la curiosité est un maître-mot. S’impliquant dans des recherches de matières et de structures chorégraphiques qui ne délaissent jamais une certaine obsession pour le questionnement de l’identité.

 

Où et Quand ?

Digested Noise – The Sun Came – Being Together Without Any Voice

Du 5 au 9 Novembre 2013 au Théâtre des Abbesses, Paris

Daniel Linehan  est Artiste Associé 2012-2014 au DeSingel (Anvers, BE), New Wave Associate 2012-2014 au Sadler’s Wells (Londres, UK) et Artiste en Résidence à l’Opéra de Lille depuis Janvier 2013

 

Photo de Une :Daniel Linehan- photo Olivia Droeshaut

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