Retour sur la 1ère Mostra Internationale Video Dance – Porto

Le 1er Mostra International de Video Dance à Porto célèbre la relation entre la caméra et la danse. Une relation de plus en plus fructueuse, pour le bonheur des artistes mais aussi des marques.

Pour la première fois, le NORTE Dance Festival organise « BODY IN FOCUS », une projection de vidéos de danse en compétition.

Pendant longtemps, il semblait impossible pour la danse de faire le grand écart entre son côté artistique, élitiste, et son côté commercial, qui nous avait habitué à une vulgarisation pour les écrans et le grand public. Toutefois, un nouveau chemin se dessine grâce aux nouveaux médias. La vidéo multiplie les possibilités, des possibilités artistiques comme financières. Elle ouvre la voie au monde de la publicité, des nouvelles technologies et à un nouveau dialogue entre les arts.

Les danseurs et chorégraphes se sont pourtant longtemps méfiés des marques et de la vidéo artistique. Ils l’utilisaient principalement comme support de travail. Beaucoup craignaient de sacrifier leur exigence artistique et leur créativité.

Depuis les lignes ont bougé. Les grands chorégraphes multiplient les collaborations pour des groupes de musique (Jungle ou Glass Animals) ou les marques de mode : Issey Miyake, Hermès, Chanel, H&M, Vuitton, Uniqlo, Lacoste,… L’abécédaire de la danse de Diesel, géant buzz, fait figure de symbole de cette nouvelle révolution.

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En savoir plus sur les liens danse et pub, lire notre article ici,  ainsi que ici et ici 

Il faut dire que Black Swan en 2010 avait propulsé la danse sur le devant de la scène. Benjamin Millepied est ensuite engagé pour la pub d’Air France l’Envol réalisée par Angelin Preljocaj, avant d’être nommé directeur de l’Opéra de Paris. Il travaille d’ailleurs beaucoup avec la vidéo, que ce soit pour la plateforme créative Nowness ou pour présenter la saison avec des portraits vidéo de ses étoiles.

Internet a permis de réduire considérablement les coûts pour une grande partie de l’économie. Il s’agit de même d’un outil formidable pour les chorégraphes émergents afin d’expérimenter et de se faire connaître. Face au prix exorbitant du spectacle vivant, le web et la démocratisation d’outils et appareils technologiques permettent à la nouvelle génération de s’exprimer plus, de s’exprimer autrement.

Rafael Molina a interviewé pour CCCdanse, Charlotte Colmant, danseuse à New York et présente dans deux vidéos sélectionnées au Festival BODY IN FOCUS.

Charlotte Colmant dans _Exposure' de Caleb Hammond
Charlotte Colmant dans ‘Exposure’ de Caleb Hammond

Comment as-tu été amené à travailler avec Caleb Hammond ? Comment s’est passé le tournage d’Exposure, présenté au Festival BODY IN FOCUS ?

J’ai rencontré Caleb lorsque j’ai passé l’audition pour son spectacle « The Irresistible » fin mars. Notre rencontre s’est très bien passée, il m’a donc proposé de danser pour NOM qui se jouait deux fois par semaine pendant un mois. Quelques jours avant la première représentation, Caleb m’a parlé du festival de vidéo de danse « BODY IN FOCUS » au Portugal et m’a demandé si je voulais bien qu’on s’associe et travaille sur une vidéo ensemble. La date limite pour postuler étant très proche, nous avons tourné la vidéo entre deux représentations le meme weekend, puis travaillé rapidement sur le montage. Le tournage s’est très bien passé. Nous partageons une sensibilité artistique commune donc tout s’est fait de manière très naturelle, sans beaucoup de mots.

 Qu’est-ce que cela change en tant qu’interprète de danser pour une vidéo par rapport à une scène traditionnelle ?

Danser sur une scène traditionnelle c’est danser devant un public et donc généralement un grand nombre de personnes. Danser devant une camera est plus intime, ou anonyme. La caméra n’est pas un être humain, mais un focus. Elle devient un partenaire, car elle est active et non pas passive comme un spectateur. Il y a un jeu qui s’établit, qui me plaît beaucoup. Néanmoins, je n’ai pas l’impression de donner autant que ce je peux offrir lorsque je danse sur scène, devant un public.

Tu tournes toi-même des vidéos de danse, dont une a été également sélectionnée au Festival BODY IN FOCUS. Qu’est-ce qui t’intéresse dans ce travail ?

J’ai commencé à tourner des vidéos grâce à mon intérêt pour la chorégraphie. Selon moi, il y a un grand rapport entre le montage de vidéo et le travail de chorégraphe. Monter une vidéo de danse c’est re-chorégraphier visuellement une danse. C’est un peu comme un puzzle, des fragments de mouvements que l’on peut mélanger, transformer, effacer… J’ai l’impression de chorégraphier un spectacle visuel.

 

Comment as-tu fait travailler les danseurs au préalable ?

Je travaille toujours avec des danseurs que je connais très bien. Je n’ai généralement pas besoin de leur communiquer beaucoup car je leur fais confiance. Dans mes vidéos, je ne cherche pas à communiquer un message particulier ou une histoire, je me sens encore enfant pour cela, j’expérimente. Mon intérêt est visuel et esthétique, il y a déjà beaucoup d’histoire dans le corps de chaque danseur avec qui je travaille, je leur demande juste de l’extérioriser par eux-mêmes. C’est mon travail de monteur après qui importe, de ressortir visuellement ce qu’ils ont exprimé.

 

Filmer de la danse, est-ce récent ? Qu’est-ce qui a changé aujourd’hui ?

Non, filmer de la danse n’est pas récent. A la fin du 19e siècle et au début du 20e déjà la danse apparaît au cinéma, dans les films muets. Mais c’est surtout Maya Deren, réalisatrice et danseuse américaine, qui marque la naissance d’une avant garde proche de Cocteau, et du cinéma expérimental des années 40. Maya Deren innova les techniques pour caméra qui permettent une nouvelle approche de filmer la danse et le mouvement. Le concept de « videodanse » s’inscrit dans la lignée du travail cinématographique de Maya Deren et c’est de son travail que je me suis le plus inspiré dans mes vidéos.

Depuis, l’utilisation de la vidéo dans la danse s’est beaucoup développée. Aujourd’hui elle est s’est commercialisée. La publicité notamment fait régulièrement appel à des danseurs.  L’apparition de nouvelles technologies a également contribué à l’évolution et l’essor de la vidéo dans la danse.

 

Quelle est la place de la vidéo dans le monde de la danse contemporaine à New York ?

La vidéo est un outil très utilise par les compagnies de danse a New York, comme support publicitaire. J’ai travaillé pour quelques compagnies ici à New York comme vidéaste et toutes m’ont demande de leur créer des vidéos publicitaires pour vendre l’image de leur compagnie.

New York est une ville qui n’a peur de la mixité. Donc la danse et la vidéo s’y rencontrent assez facilement. Que ce soit sur scène, dans une galerie d’art ou une salle obscure.

 

En savoir plus

Mostra Internationale Dance Video de Porto

Sur Charlotte Colmant 

 

 

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