Louve, c’est le titre de la nouvelle création de la compagnie La Guetteuse, dirigée par la danseuse et chorégraphe Emeline Nguyen, ce pourrait être Louves, car elles sont deux à occuper la scène et à faire résonner leurs univers propres. Louve se présente en effet comme un duo, danse et musique live, Emeline Nguyen ayant demandé à la chanteuse et musicienne Ottilie[B] d’être sa complice sur ce projet. Ce conte chorégraphique, nous plonge dans un univers entre rites chamaniques et modernité radicale, entre animalité et singularité de la figure féminine, qu’elle se réfère à l’image de la sorcière ou aux femmes en lutte pour leurs droits.
Les matières se mêlent ici pour créer des ambiances et des univers qui nous dépassent et nous semblent pourtant très familiers, fumées, chaudron, argile, fourrure, bâtons dressent un décor qui ne serait qu’accessoire sans la puissance des matières de corps et de voix des deux interprètes. Des matières sculptées par la mise en lumière de Véronique Gougat, magnifique créatrice lumière qui anime l’espace et exalte les corps et les visages.
Ainsi, Louve est une expérience à vivre, une sorte de chemin initiatique où un compte à rebours des destinées et des assignations féminines se déploient et se juxtaposent avec l’affirmation de la puissance assumée des femmes aujourd’hui.
Une puissance qui se traduit dans la danse, l’utilisation des bâtons, le port de la pelisse ont sculpté le corps de la danseuse, qui devient guerrière tourbillonnante, après avoir été sorcière boiteuse et inquiétante, ou louve aux aguets. La danse est précise, engagée, passant d’une fluidité animale à une nervosité de hip hopeuse, ou au minimalisme du Butô ne travaillant que sur les mains ou le placement des pieds.
Emeline inverse aussi les a priori, elle ne semble jamais aussi puissante que lorsqu’elle apparaît jambes nues et accède à une vulnérabilité et une douceur lorsqu’elle se recouvre d’argile. Une épiphanie à l’envers comme si au final, cette couche supplémentaire de matière la dépouillait d’une forme de violence primitive et la révélait dans sa condition de femme parmi les femmes. Femme souillée, femme stigmatisée mais femme qui sait aussi trouver la complicité d’une autre comme lors d’un duo chanté avec Ottilie [B]. La connivence et l’écoute des deux interprètes harmonisent leurs matières, même précision, même prises de risque, même jeu avec les limites du corps, chacune apporte sa singularité et permet au spectateur de voyager dans l’espace et le temps, retour au primitif ou immersion dans les bruits de nos villes et les beats de la musique électronique.
Louve, crée des univers visuels, sonores et chorégraphiques puissants, propices à nous rappeler ces contes et mythologie qui nous parle des louves comme animal tout à la fois terrifiant et protecteur, fidèle à son groupe mais aussi solitaire, altruiste et rebelle. Une belle figure de radicalité parfaitement servie par les deux interprètes au plateau qui ont aussi bénéficié du regard extérieur avisé d’Alexandre Del Perrugia.
Ainsi, vous pourrez accueillir la Louve en vous dès le 14 janvier 2020 à 21h15 au Théâtre 145 dans le cadre d’une soirée Escapade dansée proposée en co-réalisation par La Rampe d’Echirolles et le Théâtre municipal de Grenoble voir ici !
Louve
Conception, chorégraphie, interprétation : Emeline Nguyen. Création musicale, chanteuse et musicienne : Ottilie Bouchareu. Regard extérieur Alexandre Del Perrugia et Alice Bounmy. Création lumière : Véronique Gougat. Production Cie La Guetteuse.
Où et quand ?
Louve, Cie La Guetteuse, création 2020
14 janvier 2020, Théâtre 145 de Grenoble 21h15
21 février 2020 20h30, TEC (Travail et Culture) St Maurice l’Exil (38)
28 mai 2020, La Source (deux représentations 1 scolaire en après-midi et 1 tout public le soir), Fontaine (38)
Image de Une, Louve, Cie La Guetteuse crédit photo Annie Sorrel.